Rosa Luxemburg, Benedetto. Une lecture de Rosa Lux … “allons parle petite femme parle”

allons parle

petite femme

parle

Difficile de trouver le texte d’André Benedetto Rosa Lux. Certainement, il va être réédité. Mais en attendant, il avait été impossible de le lire jusqu’à un cadeau inattendu, inespéré. La lecture aussi est ardue, si l’on s’attend à des repères de temps, d’espace, une construction linéaire alors qu’il faut s’inventer sans cesse sa ponctuation, chercher sans cesse qui parle, de quoi, trouver sans cesse son chemin dans la typographie des mots. Une première lecture échoue. La deuxième est la bonne, quand on se glisse enfin dans la pensée  d”un narrateur aux prises avec les affres de l’imagination, de la création plutôt. On le suit, alors qu’il veut s’imposer une idée, la peste de 172O à Marseille, mais ce qui s’impose finalement à lui, dans un présent désordonné, déstructuré, c’est la présence de Rosa Luxemburg.

Elle est là,

figée dans la photo, le sac noir à la main et ce chapeau.

Elle surgit,

femme superbe femme

dressée mille chevaux

sur la tête celui de Guernica

son casque de nana c’est

le cheval de Guernica-Rubens

Elle se présente

rosa lux

déclinaison

déclinez vos nom prénom profession

rosa lux

née le

à berlin

non à varsovie

morte le

à berlin

oui

assassinée

oui

par qui

oui

par qui

oui

par qui

oui

par

la

so

cial

mo

cra

tie

Un texte surgit, un extrait de lettre de Rosa Luxemburg, sans ponctuation, à l’impromptu, on finit par le reconnaître. C’est un extrait d’une des lettres écrites à Sonia Liebknecht , tirée d’un livre qui vient alors d’être publié en France (en 1970, l’un des plus beaux ouvrages de sa bibliographie. Peut-être ce livre a-t-il déclenché l’écriture de Rosa Lux, on se plaît à le penser).

Et à la fin de ce texte-poème d’André Benedetto magnifique, trois textes s’entrelacent, un extrait d’une autre lettre, de Rosa Luxemburg aujourd’hui devenue un grand classique: les buffles, un compte rendu de ce qui s’est réellement passé à Marseille et la biographie de Rosa Luxemburg. Qui se termine par son assassinat, comme le récit sur Marseille se termine par l’invasion de la peste, comme la lettre de Rosa Luxemburg montre que la cruauté humaine contre ces animaux est une métaphore de la boucherie du premier conflit mondial.

Et le sens du choc des trois événements dans la pensée du narrateur, la grande peste, la guerre de 14 et la répression de la révolution spartakiste où mourut assassinée Rosa Luxemburg, prend alors son sens: c’est la même exploitation capitaliste qui est là à l’œuvre, ce sont les mêmes intérêts qui mènent à la peste, la guerre comme à la répression de la révolution spartakiste.

Et c’est pourquoi l’image de Rosa devait se frayer un passage dans l’esprit conscient du narrateur comme dans nos consciences …

C’est une femme morte

une apparence

remettez-là dans son cercueil

on ne peut plus

elle est vivante

elle respire

qu’elle parle pour elle-même

on a attrapé le temps à la course

dans l’asphyxie du moment tous ensemble

allons parle

petite femme

parle

Ce texte a été écrit en 1970

en une espèce d’hommage

qui tombe à cheval

entre le centenaire de sa naissance

et le cinquantenaire de son assassinat

La  pensée et l’action de Rosa Luxemburg ne cessent de prendre de l’importance, comme le montrent en ce moment les références à ses analyses sur la grève générale en plein mouvement .

Rosa Luxemburg n’a pas fini de parler et de s’imposer à nous.

Dominique Villaeys-Poirré

Publié le 1er novembre 2010 sur Une lecture de Rosa Lux d’André Benedetto ou la présence incessante de Rosa Luxemburg comprendre-avec-rosa-luxemburg.over-blog.com

 

Rosa Lux Benedetto
Bibliographie d’André Benedetto http://theatredescarmes.pagesperso-orange.fr/livres.htm

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