Le second article de la série est consacré au deuxième emprisonnement de Rosa Luxemburg du 4 mars à août 1906, à Varsovie.
Celui-ci est très différent des quatre autres emprisonnements car il se produit en plein processus révolutionnaire et c’est pour sa participation que Rosa Luxemburg connaît la prison. En effet, elle rejoint la Pologne alors sous domination tsariste durant la révolution russe de 1905. Elle s’implique comme toujours par les écrits, la rédaction de tracts, la réflexion avec les autres militants. Elle est arrêtée, emprisonnée. L’affaire est, comme elle dit, “somme toute sérieuse” [si sérieuse qu’il y eut plus de 1000 exécutions, dont Kasprasz, mentor de Rosa Luxemburg adolescente, figure historique qui fut exécuté pour avoir défendu une imprimerie] et elle risque réellement l’exécution. Arrêtée sous une fausse identité, elle est d’abord incarcérée à l’Hôtel de Ville puis transférée à la prison de Varsovie. Elle y connaît les conditions des arrestations massives de l’époque, les prisonnières sont arrêtées par dizaines et entassées dans des cellules prévues pour un ou deux prisonniers. Transférée à la prison de Varsovie, elle y retrouve l’emprisonnement en cellule individuelle. Elle sera transférée dans le pavillon X, réservé aux prisonniers jugés dangereux. Protégée par sa nationalité allemande, elle est finalement assignée à résidence, libérée sous caution et rejoint l’Allemagne en décembre. De nouveau, quelques remarques à partir des lettres
Vivre l’arrestation. Vive la révolution
Face à l’arrestation et malgré sa gravité, Rosa Luxemburg dans ses lettres nous transmet le même humour, la même distance face à l’événement, la même volonté de ne pas s’apitoyer.
Mes très chers amis, Le dimanche 4 au soir, le destin m’a rattrapée: j’ai été arrêtée. J’avais déjà fait viser mon passeport pour le retour et j’étais sur le point de partir. Eh bien, il faut faire s’en arranger. J’espère que vous ne prendrez pas les choses plus à cœur que je ne le fais. Vive la ré …! Avec toutes ses conséquences. Dans une certaine mesure j’aime encore mieux être enfermée ici que de devoir … discuter avec Peus …L’affaire somme toute est sérieuse, mais nous vivons des temps mouvementés où “tout ce qui existe mérite de disparaître”.
Vivre les arrestations massives
Elle nous livre un récit imagé des joyeusetés des arrestations massives qui rappelleront peut-être aux plus anciens quelques joyeuses expériences de la souricière sous l’hôtel de ville parisien, bien que dans des circonstances bien moins “sérieuses”.
Me voici enfermée à l’hôtel de ville où l’on a parqué ensemble “politiques”, prisonniers de droit commun et aliénés. Ma cellule, qui est le joyau de l’ensemble (une cellule d’isolement ordinaire prévue pour une personne, en temps normal), abrite 14 pensionnaires; par bonheur, rien que des politiques. Contigües à la nôtre, il y a encore deux grandes cellules prévues normalement pour deux prisonnières Dans chacune, il y a près de 30 personnes. Et déjà, c’est le paradis, à ce qu’on m’a dit; auparavant il y avait 60 personne dans une cellule, dormant à tour de rôle quelques heures par nuit, tandis que les autres “se promenaient”. A présent nous dormons, toutes comme de vraies reines, sur des châlits, en travers, côte à côte comme des sardines, et c’est très bien … Ici, on ne sait pas ce que sont les promenades dans la cour; en revanche les cellules restent ouvertes toute la journée, et on a le droit de circuler dans les couloirs au milieu des prostituées, écouter leurs jolies chansons, leurs expressions fleuries et respirer les parfums des cabinets, également grands ouverts. Ceci uniquement pour vous décrire la situation, mais non point mon état d’esprit, qui est comme toujours excellent.
L’occasion pour rappeler les différences d’incarcération aujourd’hui, l’entassement dans certaines cellules surtout dans les maisons d’arrêt et l’importance de l’intimité du respect de la personne totalement bafouée.
Vivre seule en prison
Pendant de longs mois et années, Rosa Luxemburg vivra seule en prison. Ce qu’elle en retire d’important, elle l’exprime ici : une vie réglée, qu’elle peut régler, une vie de travail, de lecture et de réflexion. Que doit contrebalancer cependant ce qu’elle décrit comme essentiel : les visites, le courrier, les contacts humains, les relations avec le monde des vivants. Ce qu’elle n’aura pas toujours!
Les conditions ici sont incomparablement meilleures, semblables à celles de Zwickau: calme, et ordre et solitude. J’ai à manger plus qu’il m’en faut, promenade quotidienne également. Mais le plus important, ce sont les relations fréquentes avec le monde des vivants, si bien que je suis en contact continuel avec les amis et … je peux écrire!
Et vivre en politique
… et deuxièmement parce que j’ai beaucoup travaillé : depuis mon arrivée ici, j’ai fini ma troisième brochure (deux sont déjà imprimées, la troisième va être mise sous presse d’ici trois jours).
Sortir des écrits clandestinement
Tout au long de ses emprisonnements, Rosa Luxemburg travaillera politiquement et devra faire sortir clandestinement ses écrits et nombre de courriers. Dans les conditions particulièrement dangereuses de la révolution russe, elle rédige et fait sortir des “incongruités”, qu’elle reçoit en retour imprimées noirs sur blanc, ce qui l’amuse et la réjouit. C’est de prison et clandestinement que sortiront certains des plus grands textes de Rosa Luxemburg jusqu’à la brochure de Junius.
Lorsque nous serons réunis de nouveau, j’aurai à vous raconter des tas de choses sur mes “impressions de voyage” et nous allons rire comme des bossus, surtout les gamins. Particulièrement, je me réjouis sous cape des “incongruités” que j’expédie d’ici toutes les nuits et de la façon dont elles me reviennent, “noir sur blanc”, un ou deux jours plus tard …
Vivre la mise sous tutelle
Mais un être humain mis “à l’ombre” est aussitôt mis sous tutelle, non seulement par les autorités, mais par ses propres amis, et traité sans aucun respect pour ses propres désirs.
De nouveau, ces lettres sont un témoignages précieux sur la prison et sa façon de la vivre.
Et pour conclure, parce que c’est toujours si agréable à lire, sur son humour toujours si incisif quelles que soit la situation, une dernière citation à propos du destinataire de la lettre et en même temps l’un des principaux responsables politiques : Savez-vous aussi quel nom a été le plus souvent prononcé à l’hôtel de ville, dans la cellule no 3, celle des politiques? “Kautsky”. Il y avait en effet en circulation plusieurs brochures traduites dudit monsieur et 15 âmes assoiffées de science soupiraient après elles à qui mieux mieux. “Savez-vous, où est le Kautsky? Comme cela n’en finissait jamais, j’avais souvent envie de m’écrier “aurons-nous bientôt la paix avec votre bougre d’imbécile de Kautsky?” Pourtant je me taisais. Une seule fois, cette question s’étant encore fait en entendre à 10 heures 05 du soir, je n’ai pu me retenir de crier “Oh si, petites sottes, je sais moi, où est Kautsky: il est dans son lit et ronfle à faire trembler les murs. …”.
LETTRES EMPRISONNEMENT 2 – 4 mars – juillet (?) 1906
Lettre à Luise et Karl Kautsky, Hôtel de Ville, reçue le 13 mars 1906
Mes très chers amis, Le dimanche 4 au soir, le destin m’a rattrapée: j’ai été arrêtée. J’avais déjà fait viser mon passeport pour le retour et j’étais sur le point de partir. Eh bien, il faut faire s’en arranger. J’espère que vous ne prendrez pas les choses plus à cœur que je ne le fais. Vive la rév. …! Avec toutes ses conséquences. Dans une certaine mesure j’aime encore mieux être enfermée ici que de devoir … discuter avec Peus. On m’a surprise dans une situation plutôt gênante. Mais n’en parlons plus! Me voici enfermée à l’hôtel de ville où l’on a parqué ensemble “politiques”, prisonniers de droit commun et aliénés. Ma cellule, qui est le joyau de l’ensemble (une cellule d’isolement ordinaire prévue pour une personne, en temps normal), abrite 14 pensionnaires; par bonheur, rien que des politiques. Contigües à la nôtre, il y a encore deux grandes cellules prévues normalement pour deux prisonnières Dans chacune, il y a près de 30 personnes. Et déjà, c’est le paradis, à ce qu’on me raconte; auparavant il y avait 60 personne dans une cellule, dormant à tour de rôle quelques heures par nuit, tandis que les autres “se promenaient”. A présent nous dormons, toutes comme de vraies reines, sur des châlits, en travers, côte à côte comme des sardines, et c’est très bien – à moins que nous ne soyons conviées à quelque spectacle non prévus, comme hier, par exemple, où nous est arrivée une nouvelle collègue, une femme juive, folle furieuse, qui, pendant 24 heures, nous a tenues en haleine par ses cris et ses galopades à travers toutes les cellules, ce qui a provoqué des crises de nerfs chez plusieurs des politiques. Aujourd’hui, nous en sommes enfin débarrassées et nous n’avons avec nous que trois douces “mychouggene”. Ici, on ne sait pas ce que sont les promenades dans la cour; en revanche les cellules restent ouvertes toute la journée, et on a le droit de circuler dans les couloirs au milieu des prostituées, écouter leurs jolies chansons, leurs expressions fleuries et respirer les parfums des cabinets, également grand ouverts. Ceci uniquement pour vous décrire la situation, mais non point mon état d’esprit, qui est comme toujours excellent. Pour le moment, je suis toujours incognito, mais cela ne durera pas longtemps – car on ne me croît pas. L’affaire somme toute est sérieuse, mais nous vivons des temps mouvementés où “tout ce qui existe mérite de disparaître”. C’est pourquoi, en général, je n’ai aucune foi en les créances et obligations à longue échéance. Aussi, gardez courage et moquez-vous du reste. En somme, chez nous, tant que je vivais, les choses ont marché excellemment. Je n’en suis pas peu fière; cela a constitué, dans toute la Russie, la seule oasis où en dépit “des orages et de la tourmente”, le travail et la lutte se sont poursuivis énergiquement et allègrement et nous avons “progressé” comme si nous vivions sous un régime constitutionnel des plus libéraux. Entre autres, l’obstruction (la grève), qui à l’avenir servira de modèle dans toute la Russie, est notre œuvre. Côté santé, je vais très bien. Bientôt, on me transfèrera sans doute dans une autre prison, car l’affaire est sérieuse. Je vous en aviserai alors très rapidement. Et vous, comment allez-vous mes très chers? Que devenez-vous, et Granny et Hans? Mes amitié à l’ami Franziskus … Mon arrestation ne doit pas être ébruitée sans la presse, tant que je n’aie pas été découverte. Mais alors, faites tout le tapage possible, afin que les bonnes gens ici prennent un peu peur.
Je dois conclure. Mille baisers et amitiés. Ecrivez-moi directement à mon adresse: Mme Anne Maczke, prison de l’hôtel de ville, Varsovie. je suis, sachez-le, collaboratrice de la Neue Zeit. mais bien entendu écrivez dans les règles. Amitiés encore. On ferme la cellule, je vous embrasse de tout cœur. votre Anna.
Lettre à Luise et Karl Kautsky, Hôtel de Ville, reçue le 15 mars 1906
Cher Karl, quelques lignes seulement. Je vais bien; aujourd’hui ou demain, on me transfère dans une autre prison. Pour l’heure, rien qu’ une demande: ici se trouve le correspondant de la .LV., un M. Otto Engelmann, de Berlin (tu le connais, c’est ce monsieur blond qui a longtemps demeuré Cranachstrasse). Au cas où l’on s’informerait auprès de la rédaction de la L.V., si le fait est exact, elle devra confirmer qu’il est en effet parti pour Varsovie, il y a quelques mois en qualité de correspondant (si l’on pose la même question pour un autre nom, qu’elle confirme en tout cas). J’ai eu des nouvelles de ma famille: je regrette beaucoup qu’ils prennent mon affaire tellement au tragique et qu’ils vous dérangent tous. Je suis parfaitement sereine. Mes amis insistent pour que j’envoie un télégramme à Witte et écrive au consul. Il n’en est pas question! Ces messieurs attendront longtemps qu’une social-démocrate leur demande protection et justice. Vive la révolution! Soyez gais et dispos, sinon je vous en voudrai sérieusement. Le travail, dehors, avance bien, j’ai lu dernièrement de nouveaux numéros du journal. Hourrah!
Rosa
Ecrivez-moi directement d’ici quelques jours, vous pourrez adresser vos lettres : Prison Pawiak, rue Dzielna, Varsovie, pour la détenue politique unetelle.
Lettre à Luise et Karl Kautsky, Prison Pawiak, reçue le 7 avril 1906
Mes bien-aimés, je ne vous ai pas écrit depuis longtemps. Premièrement, parce que de jour en jour, on me fait espérer que je pourrai peut-être vous télégraphier “au revoir” et deuxièmement parce que j’ai beaucoup travaillé : depuis mon arrivée ici, j’ai fini ma troisième brochure (deux sont déjà imprimées, la troisième va être mise sous presse d’ici trois jours). Dans mon précédent logis, on ne pouvait songer à travailler; aussi s’agissait-il de rattraper ici le temps perdu. D’ailleurs ici encore, je ne dispose que de quelques heures dans la soirée, de 9 heures du soir environ à 2 heures du matin; car le jour, depuis quatre heures du matin, il règne ici, dans toute la maison et dans la cour, un charivari infernal: les collègues “de droit commun”, ne font que se disputer et piailler, les “myhouggene” ont des accès de fureur, qui se manifestent, surtout chez le beau sexe, par une étonnante volubilité. A propos, je me suis révélée ici de même qu’à l’hôtel de ville d’une merveilleuse aptitude de dompteuse de folles et il n’est pas de jour où je ne dois pas descendre dans l’arène pour ramener le calme par quelques mots dits à voix basse une forcenée bavarde qui fait le désespoir de tout le monde (c’est, évidemment un hommage involontaire à une langue encore mieux pendue). Ainsi je ne puis me concentrer et travailler que tard dans la soirée et c’est aussi pour cette raison que j’ai négligé en partie ma correspondance. Les nouvelles de chez vous me causent toujours une joie grande et durable, car je relis chaque lettre plusieurs fois jusqu’à ce qu’une autre arrive. Les aimables lignes d’Henriette m’ont fait également grand plaisir. je lui écrirai, sauf si … comme on me le dit aujourd’hui encore “on m’apporte des fleurs pour la dernière fois” (c’est vrai je reçois presque chaque jour des fleurs fraiches). Attendons de voir ce qui arrivera demain. Je suis plutôt sceptique et travaille comme si cela ne me concernait nullement. …
Je ne songe nullement brûler la politesse à l’oncle de Weimar, quels que soient ses mauvais desseins [elle risque l’arrestation en Allemagne], pourvu qu’il me laisse – ce qui est le cas d’ordinaire – un peu de répit et renvoie la grande échéance aux calendes grecques. Car tomber ainsi sans transition, dans ses bras hospitaliers, je n’en ai vraiment pas le temps et j’ai mieux à faire. ainsi donc mes très chers, tâchez de savoir auprès de thébains bien informés, non pas à quoi je dois m’attendre en fin de compte, car je m’en fiche royalement, mais, si dès que le bout de mon nez aura humé la liberté du royaume de Prusse, (car chez moi, c’est toujours le nez qui passe en premier), je ne serai pas saisie par le bout de ce même nez et fourrée au trou, en punition de mon escapade. Car c’est la seule chose qui m’intéresse. Lorsque nous serons réunis de nouveau, j’aurai à vous raconter des tas de choses sur mes “impressions de voyage” et nous allons rire comme des bossus, surtout les gamins. Particulièrement, je me réjouis sous cape des “incongruités” que j’expédie d’ici toutes les nuits et de la façon dont elles me reviennent, “noir sur blanc”, un ou deux jours plus tard. ..
Votre rosa
Ecrivez bientôt.
Un souvenir particulièrement cordial à l’ami Fransiskus et à a sa femme. Comment va la L.V.? Je n’en entends pas parler ici. J’ai dit souvent qu’Auguste était capable de faire évanouir les gens à force de parler. Nous y voilà. J’ai cependant une vague idée que cet évanouissement-là devrait sauver notre paladin d’une chute politique et le remettre d’aplomb sur ses jambes, qui devenaient chancelantes. Savez-vous aussi quel nom a été le plus souvent prononcé à l’hôtel de ville, dans la cellule no 3, celle des politiques? “Kautsky”. Il y avait en effet en circulation plusieurs brochures traduites dudit monsieur et 15 âmes assoiffées de science soupiraient après elles à qui mieux mieux. “Savez-vous, où est le Kautsky? Comme cela n’en finissait jamais, j’avais souvent envie de m’écrier “aurons-nous bientôt la paix avec votre bougre d’imbécile de Kautsky?” Pourtant je me taisais. Une seule fois, cette question s’étant encore fait en entendre à 10 heures 05 du soir, je n’ai pu me retenir de crier “Oh si, petites sottes, je sais moi, où est Kautsky: il est dans son lit et ronfle à faire trembler les murs. …”.
Lettre à Luise et Karl Kautsky, Prison Pawiak, avril ou mai 1906
Mes très chers amis j’ai reçu votre lettre du 16. Vous pouvez m’écrire tout ce que vous voulez par la même voie et sous pli recommandé, cela m’arrive très bien. Les conditions ici sont incomparablement meilleures, semblables à celles de Zwickau: calme, et ordre et solitude. J’ai à manger plus qu’il m’en faut, promenade quotidienne également. Mais le plus important, ce sont les relations fréquentes avec le monde des vivants, si bien que je suis en contact continuel avec les amis et … je peux écrire ! Où en est mon affaire? Je n’en ai aucune idée: les amis espèrent me voir bientôt près de vous. … Je suis fort chagrine de savoir que ma famille ait fait si grand cas de mon affaire et l’ait soumise à nos patres conscripti; je m’ y serais formellement opposée. Mais un être humain mis “à l’ombre” est aussitôt mis sous tutelle, non seulement par les autorités, mais par ses propres amis, et traité sans aucun respect pour ses propres désirs. Qu’importe! Mais je te prie instamment, cher Carolus, d’empêcher qu’on ne s’adresse à Bülow; en aucun cas je ne voudrais lui devoir quoi que ce soit car plus tard dans nos campagnes, je ne pourrais plus parler de lui et du gouvernement librement comme il convient.
Votre R.
Les journaux locaux annoncent que je serai traduite en conseil de guerre. Je n’en sais rien pour l’instant: soyez donc tranquilles, c’est certainement un canular.
A propos de Lettres en prison
Les lettres de prison ont bouleversé, étonné, participé de la prise de conscience de nombreux lecteurs depuis les années 70 et la première publication chez Bélibaste de la très belle traduction de Michel Aubreuil, des lettres à Sonia Liebknecht, la jeune femme de Liebknecht, lui-même détenu. A l’occasion de la Quinzaine Rosa Luxemburg à Saint-Étienne, il nous était apparu important de replacer ces lettres dans le contexte plus général de la prison et des emprisonnements de Rosa Luxemburg. Aujourd’hui, nous avons proposé de reprendre ce travail et cette réflexion dans la série d’émissions sur Rosa Luxemburg sur la radio FPP, dans l’émission de et en hommage à Claudine Roméo, “Naïves questions de philosophie”. Nous sommes donc allés à la recherche tout d’abord des indications précises sur les 5 emprisonnements de Rosa Luxemburg : dates, lieux, actes d’accusation (sur le site, lire Les cinq emprisonnements de Rosa Luxemburg). Ceci est peu connu ou peu présent dans l’esprit de ceux qui suivent sa pensée et son action. Puis à la recherche des lettres en allemand et en français pour donner un accès direct à ces courriers. Les sources disponibles sont les lettres à Leo Jogiches chez Denoël en 1971, les lettres à Karl et Luise Kautsky aux PUF, les ouvrage de Gilbert Badia, Vive la lutte chez Maspéro, l’édition allemande Gesammelte Briefe chez Dietz Verlag. Quelques lettres sont déjà disponibles sur le net. La plupart ont dû être saisies pour pouvoir être publiées ici. Pour les traductions, certaines ont été reprises telles quelles, d’autres ont été revues, certains courriers ont été traduits par nos soins (Nous préciserons ce point très rapidement dans cet article pour chacun des courriers cité). Il s’agit donc d’un travail de fond et inédit dont nous espérons qu’il rencontrera l’intérêt de tous. Comme à l’habitude, nous vous invitons à proposer des précisions, à rectifier des erreurs possibles, et à indiquer des améliorations concernant les traductions. Nous pensons cependant qu’en l’état, ce travail peut déjà être utile à nombre d’entre vous. Nous avons souhaité d’autre part dans l’émission aborder le problème de la prison en elle-même et faire le lien avec la prison aujourd’hui, c’est pourquoi nous avons intitulé cette série non pas lettres de prison, mais lettres en prison, en espérant contribuer à faire comprendre ce que peut signifier l’emprisonnement à partir de ce que Rosa Luxemburg a vécu.