Rosa Luxemburg et la Commune (6). La Commune, le capital et l’armée de réserve, extrait de l’Introduction à l’économie politique.

Introduction à l’économie politique V : LE TRAVAIL SALARIÉ

“Un autre exemple criant a été fourni, en 1871, par les capitalistes français. Après la chute de la Commune, le massacre des ouvriers parisiens, dans les formes légales et en dehors d’elles, prit de telles proportions que des dizaines de milliers de prolétaires, souvent les meilleurs et les plus travailleurs, l’élite de la classe ouvrière, furent assassinés; alors le patronat, qui avait assouvi sa soif de vengeance, fut quand même pris d’inquiétude à l’idée que le manque de “ bras ” en réserve risquait d’être cruellement ressenti par le capital; l’industrie allait, à cette époque, après la fin de la guerre, vers une expansion importante des affaires. Aussi plusieurs entrepreneurs parisiens s’employèrent-ils auprès des tribunaux pour modérer les poursuites contre les Communards et sauver les bras ouvriers du bras séculier pour les remettre au bras du capital.”

Introduction à l’économie politique V : LE TRAVAIL SALARIÉ

La formation de l’armée de réserve

Source : https://www.marxists.org/francais/luxembur/intro_ecopo/intro_ecopo_53.htm

Quand elle augmente la charge du travail et diminue le niveau de vie des travailleurs jusqu’à la limite physiologiquement possible et même en deçà, l’exploitation capitaliste ressemble à l’exploitation de l’esclavage et du servage au moment de la pire dégénérescence de ces deux formes d’économie, donc quand elles étaient près de s’écrouler. Mais ce que seule la production marchande capitaliste a engendré et qui était complètement inconnu de toutes les époques antérieures, c’est le non-emploi et par suite la non-consommation des travailleurs, en tant que phénomène permanent, ce qu’on appelle l’armée de réserve des travailleurs. La production capitaliste dépend du marché et doit suivre la demande. Cette dernière change constamment, engendrant alternativement ce qu’on appelle les années, les saisons, les mois de bonnes et de mauvaises affaires. Le capital doit constamment s’adapter à ce changement de la conjoncture et occuper en conséquence tantôt davantage, tantôt moins de travailleurs. Il doit, pour avoir continuellement à sa disposition la quantité nécessaire de force de travail répondant aux exigences même les plus élevées du marché, maintenir en réserve un nombre important de travailleurs inemployés, à côté de ceux qui sont employés. Les travailleurs inemployés n’ont pas de salaire, puisque leur force de travail ne se vend pas, elle est seulement en réserve; la non-consommation d’une partie de la force de travail est partie intégrante de la loi des salaires dans la production capitaliste.

Comment des chômeurs réussissent à vivre, cela ne regarde pas le capital, il repousse toute tentative de supprimer l’armée de réserve comme une menace contre ses propres intérêts vitaux. La crise anglaise du coton en 1863 en a fourni un exemple éclatant. Lorsque le manque de coton brut américain força soudain les filatures et les tissages anglais a interrompre leur production et que près d’un million de travailleurs se trouvèrent sans pain, une partie de ces chômeurs décida d’émigrer en Australie pour échapper à la famine. Ils demandèrent au parlement anglais d’accorder deux millions de livres sterling pour permettre l’émigration de 50 000 ouvriers sans travail. Cette requête ouvrière provoqua les cris d’indignation des fabricants de coton. L’industrie ne pouvait vivre sans machines, et les ouvriers sont comme les machines, il en faut en réserve. “ Le pays ” subirait une perte de quatre millions de livres sterling, si les chômeurs affamés partaient subitement. Le parlement refusa en conséquence le fonds d’émigration et les chômeurs continuèrent à tirer le diable par la queue, pour constituer la réserve nécessaire au capital. Un autre exemple criant a été fourni, en 1871, par les capitalistes français. Après la chute de la Commune, le massacre des ouvriers parisiens, dans les formes légales et en dehors d’elles, prit de telles proportions que des dizaines de milliers de prolétaires, souvent les meilleurs et les plus travailleurs, l’élite de la classe ouvrière, furent assassinés; alors le patronat, qui avait assouvi sa soif de vengeance, fut quand même pris d’inquiétude à l’idée que le manque de “ bras ” en réserve risquait d’être cruellement ressenti par le capital; l’industrie allait, à cette époque, après la fin de la guerre, vers une expansion importante des affaires. Aussi plusieurs entrepreneurs parisiens s’employèrent-ils auprès des tribunaux pour modérer les poursuites contre les Communards et sauver les bras ouvriers du bras séculier pour les remettre au bras du capital. …

Pour lire L’Introduction à l’économie politique : http://www.collectif-smolny.org/article.php3?id_article=1288
LUXEMBURG Rosa : Introduction à l’économie politique
Présentation de l’éditeur – Table des matières – Parution : Novembre 2009
20 février 2011 par collectif

Œuvres Complètes de Rosa Luxemburg, tome I

Traduction de Jacqueline Bois

Préface de Louis Janover

Quatrième de couverture :

De 1907 à 1913, Rosa Luxemburg, militante et théoricienne de la gauche révolutionnaire, donne des cours d’économie politique à l’école du parti social-démocrate allemand. Alors que ce dernier se montre de plus en plus complaisant à l’égard d’un système qui conduit tout droit à la Première Guerre mondiale, Rosa Luxemburg fait ressortir les contradictions insurmontables du capitalisme, son inhumanité croissante, mais aussi son caractère transitoire. Son regard acéré, qui ne perd jamais de vue les avancées scientifiques et critiques des penseurs de son temps, embrasse les formes d’organisations sociales les plus variées, depuis le « communisme primitif » jusqu’au dernier-né des modes d’exploitation, le capital « assoiffé de surtravail ». Dans ces leçons, qui s’inscrivent dans le droit-fil de la Critique de l’économie politique de Marx comme du Manifeste communiste, elle pose la question qui resurgit aujourd’hui avec plus d’insistance que jamais – socialisme ou chute dans la barbarie !

Louis Janover, collaborateur de Maximilien Rubel à l’édition des Œuvres de Karl Marx dans la Bibliothèque de la Pléiade, restitue dans la préface toute sa portée critique à la pensée de Rosa Luxemburg.

En appendice, chronologie et notices dessinent le cadre historique et politique de la vie de cette internationaliste irréductible.


Table des matières :

-  Note des éditeurs
-  Avant-propos

-  Préface : Rosa Luxemburg, l’histoire dans l’autre sens par Louis Janover

-  Introduction à l’économie politique

  1. Qu’est-ce que l’économie politique ?
  2. La société communiste primitive
  3. La dissolution de la société communiste primitive
  4. La production marchande
  5. Le travail salarié
  6. Les tendances de l’économie mondiale

-  Appendices

  • Repères chronologiques 1857 – 1925
  • Journaux et organisations
  • Repères biographiques
  • Bibliographie indicative
  • Index des noms, auteurs et journaux cités

Voir la présentation de ce volume dans l’édition en ligne des Œuvres complètes de Rosa Luxemburg.


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