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Il est une communauté invisible que créent certaines personnalités qui relient tous les liens sensibles et conscients. Un montage sur le texte de Claudine Roméo, Art dans la révolution. En contre-point à Rosa Luxemburg.
“Le sentiment que certains font s’unir le meilleur de chacun”
Il est une communauté invisible que créent certaines personnalités qui relient tous les liens sensibles et conscients qui nous parcourent. C’est le sentiment vécu lors de certains engagements. C’est le réel vécu lors de la quinzaine Rosa Luxemburg. C’est ce qui est souvent vécu avec les textes et lettres de Rosa Luxemburg. C’est ce qui naît de ce rapprochement du texte de Claudine et de ces vignettes crées à partir de graphes sur les murs de Tunis. Le sentiment que certains font s’unir le meilleur de chacun . D.V.P. C’est ce que nous avons vécu lors de l’enterrement de Claudine.
L’inhumation, ce vendredi 27 février, a rassemblé plus de 200 personnes. La soirée hommage s’est poursuivie jusqu’à une heure du matin, entre danse, chants, textes, photos; multiples hippocampes légers et irisés, oxymore d’une force fragile qui nous a rassemblés comme nous avaient rassemblés les lettres en prison de Rosa Luxemburg, qui avaient mis en acte à Saint-Etienne, aussi près de deux cents personnes, chacune avec sa sensibilité et sa pensée …
(Vous pouvez cliquer sur les photos pour les agrandir)
Peu de temps pour formuler et écrire, beaucoup de « bonne » fatigue, provoquée par l’émotion, l’urgence à penser et faire les choses, au cœur de l’environnement unique créé en ce moment, au milieu des choses pensées et faites par les autres, mes sœurs et frères, mes camarades tunisiens .
Ne rien faire, ne pas penser, mais comment ne pas être propulsée dans ce tourbillon intense et créatif, tourbillon de forces centripètes et centrifuges ? Forces qui vont “dans tous les sens”, surtout dans le bon sens, le Sens del’Histoire. Ne rien faire serait se comporter en touriste de la Révolution des autres. Or, bien sûr qu’elle appartient à tout le monde, cette Révolution. Mais pas à ceux qui veulent et parfois peuvent, même, se l’approprier et la récupérer. Comme pour le reste, il n’y a pas de propriété privée de la Révolution.
Donc, pour moi, en venant vous voir et en venant à l’Isbat, bien sûr , je viens pour m’informer et informer : mais ce travail d’information sur certains médias à ma disposition, et de création de réseaux entre nous et vous, d’un continent à l’autre , est la contribution élémentaire que je pouvais porter auprès de vous. Mais, plus inattendu, la dispersion, la diversité de l’activité philosophique, le fait que le philosophe est un « touche à tout », et s’occupe de ce qui ne le regarde pas, peut le rendre à même d’établir des rapprochements entre vous. C’est un spécialiste des généralités, ou plutôt, de l’universel, alors, donc, plus inattendu, il contribue à créer des rhizomes entre vous, quand vous ne les avez pas encore établis vous-mêmes.
Mon regard et ma position transversale, à travers quelques milieux révolutionnaires tunisiens qui ne se fréquentent pas encore, peut être utile : La position universelle de l’Art, pour lequel il s’agit, comme pour la Philosophie, de « créer des concepts-« , par exemple d’ici, de Tunisie, facilite la fluidité d’une forme de pensée critique à une autre .
Et aussi, la fréquentation d’autres métiers rend des choses possibles : – jusqu’aux jeunes chômeurs, puisque la Révolution est venue d’eux, artisans, paysans, ouvriers en grève à Gafsa ou à Gabès et à Sfax, imprimeurs, et aussi, juristes , avocats, enseignants, aviateur – ils sont en grève en ce moment à Monastir – employés des télécoms, postiers, avocats, économistes, que j’ai eu la chance de pratiquer ces jours-ci.
Prolétaires « de tous pays », mais aussi de toutes régions et de tous genres, dans leurs œuvres, ils se côtoient. Le faire, déjà, la mise en œuvre, ou la main à la pâte, s’il s’agit d’un boulanger, cette position de touche-à-tout (où tous deviennent artistes et philosophes) peut à tout instant en nouer les liens, en tricoter les radicelles, et en faire des “nœuds”
… Décidément voilà que je cite Deleuze déjà 3 fois de manière cryptique … subconsciente même pour moi pendant que je vous écris cette lettre, je m’en aperçois seulement à l’instant,…
Je ne reviens pas sur la fabrique de concepts, concept et formulation verbale, ce n’est pas la même chose.
Le concept de l’art peut être rouge, dur, horizontal. Il peut être syncopé ou d’un phrasé musical net et « andante », comme les concepts de Mozart, ou débordant, quasi baroques, comme ceux de Frank Zappa. On aura compris que lorsqu’on parle de l’Art fabricant des concepts, comme la philosophie, il ne s’agit vraiment pas – sauf cas très particulier – de l’art dit « conceptuel » qui n’est qu’un cas de figure – c’est le cas de le dire !!- un cas historique particulier, d’ailleurs pas clôturé encore à ce jour.
L’Art plastique, la Musique, la définition que j’en donnerais, et la Poésie, loin d’être des conduites de fuite loin du réel, sont au contraire des activités d’intimité resserrée et quasi amoureuse avec le réel. Un rapport d’intimité que la Science, par exemple, ne pratique pas, ou il s’agirait plus de proximité distante, objectivante, pour cette Activité scientifique,
L’Art, même le plus contrôlé, et le plus « froid», pratique à coup sûr cette intimité , cette présence au réel qui enchante l’artiste, le fait s’envoler dans l’urgence de dire , de sortir, de faire émerger et bourgeonner cette sève qui lui vient du réel.
Il ne peut être que dans une appartenance radicale à cette terre , à ce monde. Sauf que, différent de la pensée magique, comme pourrait le dire Lévi-Strauss, bien qu’articulé à tout instant à elle, il ne subit PAS passivement son cadeau, mais le transforme immédiatement et toujours de manière unique. La mythologie le fait aussi, mais au cours des siècles et de manière subconsciente, sinon inconsciente, car toujours collective. Alors que , si l’art est parfois collectif, c’est par choix, et dans le ici et maintenant de l’histoire : de l’Histoire tout court, et de …l’histoire de l’art, de sa propre histoire, donc.
Tout ceci n’était qu’un long préambule méthodique.
Mais qui peut engendrer des conclusions et des effets radicalement rapides et éclatants .
Par exemple, La réalité qui nous occupe et nous porte en ce moment, c’est la Révolution, cette révolution tunisienne si particulière, si inouïe et inattendue,
Alors, l’art doit être- est- dans cette proximité folle inouïe, tout aussi impossible que la révolution elle-même, cette révolution, et alors, et il la fait, la produit dans la mesure de moyens, même très réduits. Et aussi, cet art est modulé, induit, insufflé et tendu, dans la droite ligne de la dynamique révolutionnaire, il multiplie ses interventions, il parle à chacun son langage, affect et pensée critique concrète tout ensemble. Il est dans le politique, tout à fait, mais ce Politique-là qui nous importe et nous fait vivre.
Et ce n’est pas un propos d’intellos –même de gauche !- que je tiens ici, j’ai vérifié cent fois cette réalité concrète de l’art. Il n’est pas alors, « au service » de la Révolution, ni là pour illustrer, orner, rendre belle la Révolution. Elle est intensément existante et belle, si je voulais plagier Sartre : pour lui, il n’y a pas de Nature humaine, donc pas d’essence de l’homme, il n’y a que de l’existence. Je dirais que, comme pour la réalité de l’homme, il n’a que de l’existence, et pas d’essence, Pour une- ou une autre, Révolution, il n’y a pas d’idée générale. Les occidentaux, ou de toute manière, ceux qui voient la Tunisie « de loin » , se demandent si ce qui se passe, ici, dans la rue, c’est La Révolution, si cela correspond bien à la définition du dictionnaire, si ici, c’est fidèle à l’idée abstraite de Révolution, en bons « intellectuels de gauche », ils concluent presque toujours « ça n’est pas une Révolution ».
Pour la Révolution , et la vôtre, la nôtre ici et maintenant, il n’y a que de l’existence aussi.
Et sa réalité trouve ses multiples et libres actes , “artistiques dans l’acte même – Sidi Bouzid, ou la rue de Tunis- ou dans l’expression concrète simultanée de l’acte , L’ART, qui est un acte aussi.
Je crois que si on s’en tient à cette analyse, de la Révolution comme Réalité, l’artiste, les artistes ne peuvent tomber, ni dans la mièvrerie, ni dans la confusion – danger si redoutable en ce moment électoraliste.
Pour nous, ce réel si urgent, si pressant, au battement de cœur et de sang si forts, NOUS DONNE SA FORCE .